Un Mot Des Livres

Je m'appelle France et j'écris depuis l'âge de 11 ans. Ma plus grande peur, je crois, était de ne pas me souvenir. Je voulais me souvenir de tout ou presque. Le temps efface trop vite les moments de vie épars. Je voulais les rassembler avant qu'ils ne disparaissent et retrouver le fil de MON HISTOIRE pour qu'elle fasse sens. Sans quoi la vie m'aurait paru trop absurde. Sans la mémoire, pas d'histoire. Ces parcelles de vie du temps passé, diffuses en moi, allaient devenir le théâtre de mes interrogations et les auteurs des chapitres à venir du Livre de ma vie.

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Il me fallait les reconnaitre ces mémoires fécondes, et les apprivoiser afin d'en diminuer le pouvoir, que je puisse offrir à mon âme cet espace de création essentiel à sa vitalité. J'ai veillé, tel un gardien de nuit, à ne pas éteindre la flamme de l'inspiration. 

Surtout me souvenir, à tout prix! J'entrepris d'écrire mes mémoires dès mon entrée au Collège! Je fouillais sans relâche parmi toutes les images qui s'invitaient déjà dans mon esprit et je plongeais, confiante, dans les méandres du labyrinthe abyssale du souvenir. C'est alors que je découvris une pépite, toute petite et très ancienne, une merveilleuse page de mon enfance! 

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Je devais avoir deux ans. J'étais penchée au-dessus d'une immense malle blanche au couvercle très lourd pour mes frêles épaules. Je cherchais quelque chose de précieux pour moi et je me souviens encore de ma ténacité. Il y avait au fond de ce coffre vide un petit sac rouge des plus vifs dont je désirais ardemment me saisir et, tandis que j'essayais de l'atteindre, j'aperçus une rondelle de citron d'un jaune éclatant, juste à côté du sac. Mais que pouvait bien faire cette rondelle de citron dans le fond de cette malle?

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Je me souviens de la force de mon étonnement. Cet étonnement ne s'exprimait pas sous la forme de phrases. Il s'était présenté à moi sans mot mais accompagné d'une émotion vivace et j'ai su dès cet instant, du haut de mes 11 ans, que l'émotion était langage, un langage familier aux enfants et aux animaux dont l'innocence n'a nul besoin du Verbe pour ressentir et penser le monde!

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Toutefois les mots allaient devenus l'outil par lequel j'allais pouvoir traduire une émotion quand elle m'étreint. Et malgré leurs limites, les mots prennent toute leur force lorsque j'écoute au-delà du sens, au-delà de l'intention et au plus près de l'énergie qu'ils véhiculent!